Bienvenue dans l’épisode #4 de la newsletter À L’ŒUVRE. Nous sommes 910 ici (+150 par rapport à l’épisode 3 : bienvenue aux nouveaux arrivants).
Aujourd’hui, je vous partage 15 perspectives pour 5 secteurs pour aider à les repenser :
3 en 🏡 bâtiment et habitat pour construire à partir de l’existant
3 en 🚜 agriculture pour cultiver la résilience
3 en 🏭 industrie pour retrouver la culture de l’atelier
3 en 🎥 médias et formation pour changer de lentilles
3 (et un bonus) en 🚲 mobilité et voyage pour prendre l’air pour revenir sur Terre
Toutes étayées par des exemples concrets issues de mon Tour de France auprès de 200 personnes dans 30 villes.
Un format différent des 3 premières newsletters. L’objectif est de montrer comment nombre de solutions sont déjà expérimentées sur le terrain… et pourraient s’étendre. Demain, c’est aujourd’hui, si on sait le voir et l’accompagner. Le dessous des cartes et d’autres témoignages seront développés dans de prochaines newsletters et le livre l’année prochaine
Deuxième objectif : vous proposer de commencer à construire une base de connaissances en fonction de nos expériences respectives.
Je souhaite compléter et structurer ces perspectives dans un guide accessible à la communauté, qui permette à chacun(e) de mieux situer son rôle et l’impact de son métier, son entreprise, ou son secteur.
👉 Construisons le ensemble : ajoutez votre pierre à l’édifice et partagez une perspective ou une référence (accessible plus bas aussi)
Rappel : À L’ŒUVRE vulgarise des enjeux sociétaux et explore comment contribuer à son niveau, avec des témoignages de terrain, des références inspirantes, et des pistes d’actions concrètes. Dans les 3 premiers épisodes, nous avons parlé d’attractivité de l’écologie, des dilemmes de l’action à son niveau, et de notre dépendance aux chiffres.
🎬 En attendant, c’est parti pour les 15 inspirations du jour !
🏡Bâtiment et habitat : construire à partir de l’existant
Enjeux : loger la population et héberger les activités économiques tout en réduisant la pression de la filière sur les écosystèmes
#1 Réhabiliter les friches
Comme le tiers-lieu Le lien à Tarbes, qui a repris le complexe d’une ancienne usine chimique pour y installer un espace de coworking, un service de réparation d’électroménager, une épicerie bio, une bibliothèque, un skatepark. Et cela remet aussi du vivre ensemble :
« Les tiers-lieux sont les nouveaux PMUs, MJCs, et paroisses » - Julie, gérante du tiers-lieu Le lien à Tarbes.
#2 Utiliser les innovations d’aujourd’hui…
Comme le préconise Sylvain Grisot, urbaniste et théoricien de la fabrique de la ville. Il remarque que de nombreuses ruptures technologiques ont déjà émergé dans les dernières décennies (colles, solvants, aciers, volets, composés comme l’OSB) et suffisent pour construire en atteignant les objectifs climatiques. Maintenant, il faut les déployer… et surtout penser les bâtiments dans leur environnement :
« La question de la R&D en bâtiment est hors-sujet : il faut utiliser ce que l’on a et passer du temps à penser la fabrique de la ville. A long terme, c’est peut-être aussi important que l’éducation » - Sylvain, urbaniste
#3 … et développer la seconde main dans le bâtiment
Comme la « Manufacture des Capucins » dans l’Eure. Un ancien couvent qui a été le sujet d’un appel à rénovation. Un groupement de 7 citoyens a gagné avec un projet de tiers-lieu hébergeant des évènements, des entreprises, des projets écologiques et sociaux, un jardin partagé. Et une stratégie de rénovation avec le maximum de matériaux réutilisés. Bois, mobilier, mais aussi électricité… ou isolants :
« L’isolation des murs est faite avec des livres qui partaient à la benne » - Florentin, membre du groupe Act’Eure, un réseau de professionnels engagés
Intervention à la Manufacture des Capucins. L’électricité aussi est partiellement en réemploi : le faire totalement est très compliqué car les normes n’avaient pas prévu cela.
👚🏭Biens de consommation et industrie : retrouver la culture de l’atelier
Enjeux : produire plus sobre et utile en ne dépassant pas ce que la Terre peut nous fournir, retrouver des capacités et une plus grande autonomie stratégique sur la production industrielle
#4 Faire du Made in France abordable.
Comme l’atelier de couture du Point Français, à Nice. Sitôt la porte passée, on plonge dans le cliquetis des machines, le roulement des pédales, et le sifflement des fers à repasser. Un bâtiment à la taille très humaine, et pourtant « l’un des plus grands ateliers textiles de France ». Cela fait réfléchir sur notre tissu industriel. Produire en France a des contraintes économiques bien supérieures à une production délocalisée, mais le Point Français met un point d’honneur à rester accessible.
« Il y a une distorsion de concurrence totale. Mais nous cravachons car le Made in France ne doit pas rester cantonné à une élite » - Alexandre, DG du Point Français
#5 Construire low-tech.
Comme avec le low-tech lab de Concarneau, l’association qui porte la vision du low-tech en France, documente les projets et forme citoyens et entreprises. Le low-tech, c’est un mouvement qui promeut un design des objets 1) utile (= répondant à des besoins) 2) accessible (y compris techniquement) 3) durable (et donc éco-conçu, réparable, évolutif, etc.).
« Surtout, le low-tech, c’est se réapproprier ce que l’on fait, et ainsi cela redonne du pouvoir d’agir » - Quentin Mateus, du low-tech lab
#6 Viser la qualité pour la durée
Comme chez Origine, un fabricant de vélos made in France, à Somain dans le Nord. Alors que la majorité de l’industrie utilise des cadres « sur catalogue », ils ont décidé dès les débuts de l’entreprise de créer le vélo dont ils rêvaient sans transiger sur la qualité. 10 ans après, c’est une success story incroyable : le marché se tasse, eux déménagent dans 3 fois plus grand.
« On prend les meilleurs matériaux. Même quand ça ne se voit pas. Parce qu’on sait que ça se sent. C’est grâce à cette exigence que nous avons réussi à fédérer une incroyable communauté de clients » - Rémi, DG de Origine
Illustration du floor de l’atelier Origine à Somain, dans le Nord. Chaque vélo est assemblé par un artisan responsable du processus de A à Z.
🚜Agriculture et alimentation : cultiver la résilience
Enjeux : concilier production alimentaire de qualité, respect des écosystèmes… et modèle économique viable pour les paysans
#7 Choisir l’agriculture régénératrice, l’agroécologie ou la biodynamie.
Comme Michel, vigneron à Gaillac dans le Tarn, qui cultive en agroécologie depuis 20 ans, mettant la régénération du sol comme objectif premier à travers des pratiques comme le non labour, l’intégration arbres - culture, le paillage, la rotation de cultures, le remplacement de pesticides par des alternatives naturelles, etc. L’agroécologie comme les deux autres visions agricoles sont encore minoritaires et empreintes de difficultés mais construisent une plus forte résilience à long-terme.
« Ce qui compte, c’est d’abord de redonner vie au sol. Ensuite, il saura nous nourrir, et se protéger seul » - Michel, paysan en agroécologie
#8 Lancer de l’agrotourisme
Comme Caroline, vigneronne en biodynamie à Chateau Mauvinon, à Saint-Emilion. Opérant le domaine familial avec sa mère et son frère, elle a accompli la transition en bio puis en biodynamie. Un chemin qu’ils ne veulent pas lâcher même quand la part de bio a reculé pour la première fois l’an dernier en France. Alors il faut trouver d’autres moyens de passer les années à -5%, à -30%… ou à -95%.
« C’est une occasion unique de rencontrer les clients et de casser des préjugés sur les vins bio. Et les mauvaises années, c’est grâce à l’oenotourisme qu’on peut survivre » - Caroline, vigneronne en biodynamie
#9 S’intégrer verticalement pour vendre en direct ses produits.
Comme Mélanie, maraichère en Occitanie, qui s’est équipée d’une chambre froide et a investi dans des machines de conserverie. En produisant elle même ses conserves de tomate, tartinades, et compotes, elle peut garder ses produits plus longtemps, limiter les pertes, sortir des prix bas en saison de surstock, et ne pas donner de la marge à des distributeurs. Ainsi, elle augmente sa marge et sa résilience, une levier unique quand on souhaite garder une exploitation à tailler humaine.
« Avec des tartinades, on change le monde » - Mélanie, maraîchère en agriculture régénératrice à Grenade.
🎥 Médias & formation : changer de lentilles
Enjeux : transmettre l’information, proposer des cadres de réflexion, former aux enjeux, partager des références communes
#10 Choisir des sujets importants plus que médiatiques.
Comme le prochain film des jeunes réalisateurs Arthur Gosset et Hélène Cloître sur les salariés qui s’engagent pour l’écologie au sein de leur entreprise. Un sujet qui est moins facilement filmable que d’autres… mais ils ont relevé le défi.
« Le documentaire vidéo porte une exigence de belles images. Pas toujours simple quand on parle de salariés et de vie de bureau. Mais l’enjeu en vaut l’effort » - Arthur et Hélène, réalisateurs.
#11 Utiliser des « proxys » pour sensibiliser avec un autre ton.
Comme l’association Music For Planet à Bordeaux, qui sensibilise aux questions écologiques et sociales en utilisant le vecteur de la musique. L’association organise des évènements et concerts de sensibilisation, et aide des artistes dans leur démarche écoresponsable.
« Il vaut mieux un bon musicien qu’un mauvais anthropologue » - Benjamin, fondateur de Music For Planet
#12 Sortir les personnes de leur environnement familier
Comme les Ecoles de la Transition Ecologique (ETRE), qui forment des jeunes en décrochage scolaire à des savoir-faire techniques alignés avec les exigences de la transition écologique. Menuiserie, ébénisterie, agriculture, boulangerie, cuisine, etc. 17 écoles sont ouvertes sur le territoire et chacune choisit des thématiques en lien avec les besoins locaux pour former et réinsérer des milliers de jeunes.
« On a essayé de parler climate dans les banlieues, ça n’a pas marché. On les a fait venir ici : ça marche » - Frédérik, créateur du réseau ÊTRE
🚗🚲🚄Transport, voyage, exploration : prendre l’air pour revenir sur Terre
Enjeux : Diminuer l’intensité d’émission des moyens de transport, adapter la mobilité aux besoins, faire des voyages des apprentissages (pour de vrai)
#13 Développer des véhicules plus légers…
Comme ce que l’on commence à voir sur les routes de France si on ouvre l’œil. Bicycles, tricycles, remorques, vélos-cargos, vélos-chariots, vélos-carioles, qui ne servent pas seulement au transport de personnes mais aussi à la logistique urbaine… ou périurbaine. Comme ce quadricycle transpalette que je croise à Rennes chez un sous-traitant automobile qui veut en tester la pertinence pour ses approvisionnements. Et les salariés ne s’y trompent pas :
« On voudrait utiliser notre savoir-faire pour faire des vélos cargos, pas des SUVs » - salariés du monde de l’automobile
#14 Défossiliser le transport longue distance
Comme les voiliers de la startup VELA, un projet de trimaran de marine marchande propulsé 100% à la voile et porté par le skipper de renom François Gabart et quatre designers. Le projet implique aussi le célèbre cabinet d’architecture marine VPLP, qui travaille en parallèle sur d’autres voiliers ou cargos à propulsion vélique (totale ou partielle).
« Avec Vela, on fait le choix du frêt maritime 100% voile. C’est radical, mais on veut montrer que c’est possible » - François Gabart, marin professionnel et co-fondateur de Vela.
#15 Faire du haut niveau sportif un laboratoire d’exemplarité
Comme le laboratoire en biomatériaux Explore fondé par Roland Jourdain, autre légende de la voile, à Concarneau. Avec son bateau WeExplore fariqué à 50% en fibres de lin, il a terminé deuxième de la dernière Route du Rhum, une énorme surprise alors qu’il était parti pour simplement terminer la course avec un voilier exemplaire.
« L’ambition n’était pas de gagner la course, mais de montrer une preuve de concept et raconter une autre histoire. Bon, on a quand même fait deuxièmes » - Roland Jourdain, à propos de sa Route du Rhum 2022
(#Bonus) Prendre le train et / ou le vélo
Comme la SNCF et nos jambes le permettent. Comme je l’ai fait et tant d’autres avant et après moi. Comme vous pourriez le faire.
C’est une tautologie, mais 1) nous avons un pays qui est particulièrement bien maillé en train 2) le combo vélo-train est d’une efficacité redoutable dans les transitions 3) on peut vraiment retrouver un sentiment d’aventure et d’exploration en parcourant la France comme cela.
Alors, vous faites quoi vos prochaines vacances ?
Le combo vélo-train permet de retrouver un sentiment d’exploration en France. Il est aussi d’une fluidité redoutable pour voyager.
🌟Ajoutez votre pierre à l’édifice : partagez 1 perspective en 1’ et recevez les résultats
J’espère que ces 15 perspectives vous ont intéressé et ont permis de rendre plus tangibles des situations de terrain.
J’en ai encore des dizaines en stock que j’aimerais rendre plus largement accessible… et compléter.
Cela pourrait devenir des guides sectoriels qui aident à mieux en percevoir les enjeux, et les innovations :
Pour documenter et valoriser ces personnes qui s’engagent - avec ses joies et ses peines
Pour structurer une base de références sur lesquelles s’appuyer pour mieux comprendre les enjeux sectoriels
☝️Je vous propose d’essayer de la construire ensemble
➡️ Partagez 1 perspective, 1 action, ou 1 recommendation en 1 minute dans le lien ci-dessous et recevez la synthèse :
Conclusion
Les temps sont agités, l’actualité nous le montre - encore. Pourtant on ne peut faire qu’attendre. Et surtout, on a toutes et tous des moyens et des savoir-faire qui peuvent servir.
Au fond, c’est tout le but d’À L’ŒUVRE.
C’est même le sens du mot demain.
Demain vient du latin « mane », le matin. Demain, c’est en fait le début d’un nouveau jour.
Alors, comme le disait le poète persan Omar Khayyam, peut-être bien que :
« Dans la nuit se cache la paupière du jour »
Merci et à bientôt !
Bonne fin de semaine,
Quentin 🚴♂️🏔️🌍
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Je partage ces histoires (et plein d’autres) dans des conférences d’inspiration
J’interviens auprès d’entreprises pour les aider à anticiper les enjeux de leur secteur.
Je serai ravi d’avoir vos remarques et commentaires, qui améliorent le projet !
→ Contactez-moi à : quentin@aloeuvre.com